(puits)

L’aîné, Tan, se balance sur sa chaise, ses pieds bottés nonchalamment posés sur une table. La boue qu’il a ramassée en dehors des hautes murailles, si liquide qu’elle coule sur le cuir, dégouline de ses semelles pour s’écraser sur la table, dans un bruit de succion humide répugnant. Il se permet cette impolitesse, un sourire cruel lui ourlant les lèvres, alors qu’il contemple ces stupides rebuts d’humanité, ces hommes et femmes qui courent en tous sens, leurs yeux craintivement tournés vers la cloche et la Machine, avec une flamme de superstition au fond du regard. Cette bande d’arriérés mérite ce qui va lui arriver.

Ils se sont glissés dans la ville à l’aube, en se disant que ce devait être ce que ressentaient les loups quand ils entraient dans l’enclos des brebis. La muraille épaisse, trop haute pour être escaladée, enserre le village et protège ses habitants, pareils aux bras aimants d’une mère encadrant son nourrisson. Mais maintenant que les quatre frères sont entrés, le rempart s’est changé en serpent qui interdit à ses prisonniers de s’échapper, et qui pourrait même étouffer ceux qui chercheraient à se montrer téméraires.

Le soleil s’est levé, à l’instar de tous les autres jours, mais comme s’il répugne à souiller ses rayons au contact des intrus, il se dissimule derrière les nuages, bas malgré l’avancée de l’après-midi, qui renforcent cette sensation d’oppression. Même le vent ne souffle pas, trop timide, et l’air immobile, froid, donne l’impression d’être dans un caveau. Mais Tan ne le remarque pas, pas plus que ses deux cadets. Il ne flaire que l’odeur du sang et de chair pourrissante, les effluves d’un carnage qui va servir à en perpétrer un autre.

L’un des pieds de sa chaise grince, alors il cesse de la faire osciller. Les deux autres doivent prendre cela pour une invitation à la discussion, parce qu’Am recommence à geindre.

— Peut-on commencer ? gémit l’une des silhouettes massives qui lui tiennent compagnie sur l’espèce de terrasse en prolongement de l’auberge.

— Patience, lui ordonne l’autre en se redressant.

— Mais ils m’agacent...

Sa voix suinte d’une excitation perverse, remplie de frustration. Am ressemble à un enfant privé de son jouet préféré. Ce n’est pas si loin de la vérité, mais Tan ne veut pas encore lui rendre son assortiment de couteaux. Sur ces entrefaites, il se mettrait à courir en tous sens et gâcherait le plan élaboré par Sy.

C’est normal, pense Tan. Am est le plus jeune d’entre nous, il ne sait pas encore comment se maîtriser. Et puis c’est si drôle... on ne peut pas lui en vouloir.

Ils sont trois, trois formes aussi obscures que les desseins qu’elles nourrissent. Quatre frères dont les noms assemblés forment, dans l’ancienne langue, « le Désastre ». Tansyhelam.

C’est d’ailleurs ce qu’ils ont emporté dans leurs sacs et leurs outres, mais ils attendent que Sy leur donne le signal de départ. Ils rongent leur frein, tels des fauves affamés de chaos, forcés de se tenir tranquilles.

— Va-t-il se décider ? Chouine encore Am.

— Veux-tu bien cesser, le tance Hel ?

Tan lèverait presque les yeux au ciel. Hel est le plus susceptible d’entre eux tous, et le laisser avec Am qui — malgré son âge — tient toujours du môme chouinard, c’est à peu de choses près, aller au-devant d’une crise monstrueuse qui se finira en bagarre. Hel gagnera, comme à chaque fois. Ils se ressemblent tous, de corps et d’esprit, mais Hel et Am ont hérité du tempérament impatient de leur père, quand Tan et Sy ont plus pris du côté de leur mère sournoise et calculatrice. C’est d’elle qu’ils ont ce goût de la dévastation. Mais c’est Sy la tête pensante. Même si Tan adorerait être l’intelligent du lot, c’est Sy qui, derrière sa bouche close et ses yeux plissés, invente les meilleurs stratagèmes. Il y a des fois où ça l’agace, mais il ne dit rien.

— Du calme, marmonne Tan. Retournons chercher nos affaires près des portes, Sy ne devrait plus tarder.

Am bondit aussitôt, semblable à un chien de chasse dont on viendrait de lâcher la laisse et passe par-dessus la rambarde au lieu de prendre les escaliers. Il atterrit au milieu d’un groupe d’enfants qui pousse de hauts cris effrayés. Certains se contentent de le dévisager, d’autres reculent de quelques pas ou se dispersent comme une volée de moineaux effarouchés.

— Am..., soupire Tan sur un ton de fausse réprimande.

Son plus jeune frère lui lance un regard entendu, tandis que ses grosses bottes de marche écrasent les rouages délicats des petites machines avec lesquels la marmaille s’amusait. Tan regrette de ne pas être à sa place pour pouvoir lui aussi piétiner les jouets ineptes, mais il a un rang à tenir. Les petits engrenages, qui craquent comme de petits os, résonnent à ses oreilles telle la plus douce des musiques, et à voir la mine de Hel, il n’est pas le seul à sentir la faim gonfler dans son estomac.

Il perçoit quasiment la peur qui émane des gosses aux yeux écarquillés et il passe une langue gourmande sur ses lèvres gonflées, comme pour se délecter de sa saveur. Leur mère leur a appris à répandre la terreur afin de s’en repaître ensuite. Mais ce n’était pas juste une simple frayeur, c’était une peur hideuse, cruelle, mille fois plus divertissante qu’une simple angoisse. Et ils ont fini par lui apprendre l’épouvante, à elle aussi. Tan entend presque encore ses hurlements de supplications. Mais après tout, on ne peut pas éduquer un chien à chasser et lui reprocher de traquer ce qui passe sous son nez.

Il enfonce ses mains dans les poches de son long manteau de pluie et descend les escaliers avec une lenteur effrayante. On dirait un homme, mais sa démarche souple et déliée, le fait plus ressembler à une sorte de prédateur abominable. C’en est trop pour les enfants qui prennent leurs jambes à leurs coups avec un air semblable à celui qu’ils auraient eu s’ils s’étaient retrouvés nez à nez avec des démons.

Hel sur ses talons, Tan fait signe à Am de les suivre.

Tandis qu’ils se dirigent vers la porte, marchant tous trois de front dans les ruelles de pierres inégales, c’est à peine s’ils s’inquiètent les regards qu’on leur lance. Am sautille, émoustillé par l’odeur de sang qu’il imagine, par les os qu’il se voit briser, et Tan a beau essayer de le reprendre, il devine bien que le dernier-né de la fratrie a déjà glissé dans des flots sombres où il ne peut plus l’atteindre. Il subodore aussi que sa maîtrise de lui-même vaciller, surtout quand les villageois dardent sur eux des œillades anxieuses avant de s’écarter de leur chemin. Il sent la bête à l’intérieur de lui s’éveiller, ressuscitée par des effluves amers de peur et a toutes les peines du monde à la faire patienter. Il brûle de la libérer pourtant, émoustillé comme un puceau lors de sa première visite dans une maison close, et ne peut que serrer et ouvrir les poings dans ses poches. Les grandes mains nerveuses de Hel s’agitent aussi, et pendant un moment, lorsque Tan observe leur danse hypnotique, tels des pendules hystériques attachés aux épaules de son frère, il a l’impression qu’elles étranglent quelqu’un.

Le soleil s’est définitivement enfoui dans des nappes brumeuses si noires que l’on croirait presque qu’il fait nuit et l’air refroidit davantage. Juste comme ils atteignent les doubles portes, la cloche se met à carillonner selon un ordre précis. Un coup, un silence, trois coups rapprochés, un autre silence. La volée sonore fait le même effet aux trois frères que des coups de fouet. Sy a enfin convaincu le maire qu’une horde de créatures monstrueuses s’apprêtait à ravager leur pitoyable petit village.

— Mais quelle bande de demeurés ! jappe Hel, qui commence d’ailleurs à haleter, ses iris si dilatés qu’ils en ont presque noyé l’habituelle couleur grisâtre de ses yeux.

— Peut-on s’y mettre, maintenant ? réclame le plus jeune en entreprenant de farfouiller dans leurs bagages.

Tan hausse les épaules et sourit. Plus besoin de museler la bête, à présent.

— Oui, Am, répond un nouveau venu.

C’est à peine si Tan, Hel et Am remarquent Sy, tandis qu’ils se précipitent tous les quatre vers leurs paquetages. Se bousculent tels des loups à la curée, ils se battent pour avoir les meilleurs sacs. Les « N’y touche pas », les « Laisse-moi ça » et les « C’est à moi » se mélangent, se muent en grognements rauques et bestiaux pendant que les quatre frères s’acharnent les uns sur les autres dans un fouillis de bras et de jambes. Quand enfin ils se séparent en roulant à l’écart chacun dans son coin, tous ont des puits d’ombres en lieu et place des yeux, et lorsqu’ils sourient, leurs dents paraissent un peu trop pointues pour de simples canines humaines.

— Je peux faire les maisons  ? Dites  ? Dites  ? Je peux  ? implore Am dont les mains étreignent les sacs sales et puants avec fièvre.

Tan et Sy échangent un regard entendu. L’excitation et l’adrénaline qui coule dans leurs veines les font trembler, leurs mâchoires claquent voracement et leurs doigts tâtent la toile, désirant plus que tout en dénouer les cordelettes pour enfin se plonger dans leur contenu visqueux.

— Qu’est ce qu’on avait dit  ? parvient à articuler Hel.

— Que si j’étais sage, je pouvais choisir  ! Allez, allez, je peux  ? insiste le plus jeune avec cette mine de chiot puni qu’il fait chaque fois qu’il désire obtenir quelque chose.

Tan n’a pas le cœur de le lui refuser. C’est l’une des rares fois où il y a suffisamment de travail pour qu’Am puisse y prendre part sans devoir partager avec Sy ou lui.

— Va pour les maisons, accorde-t-il avec un sourire indulgent. Qui pour le puits  ?

— Moi, moi, aboie Hel en tirant la langue.

L’aîné se tourne alors vers Sy. Il sait parfaitement bien qu’il ne doit pas tarder, sous peine de voir leurs deux petits frères détaler avant eux.

— La place ou les rues  ?

— Les rues.

Ces deux mots scellent le destin du minuscule village.

Comme un seul homme, les quatre frères se lèvent, serrant leurs précieux bagages contre eux et se précipitent vers les portes que deux préposés se hâtent de fermer. Ils percutent les battants qui explosent en dizaines de milliers d’échardes sous la force de leur charge et, lorsque les deux gardes pris par surprise font mine de riposter, Am leur fonce dessus, la main dans une petite bourse et leur projette en pleine figure des asticots. C’est à peine si la meute lancée entend leurs braillements d’effroi.

Am, toujours prêt à faire pousser l’amusement encore plus loin, hurle à la mort, les yeux révulsés et se met à chanter. Ce qui est normalement une comptine enfantine se transforme en récit de barbarie par ses lèvres.

— Je te saignerai, beugle Tan en chœur tandis qu’il galope vers la place principale, son manteau ouvert claquant derrière lui et lui dessinant des ailes diaboliques. Je t’écorcherai et je te briserai les os. N’est-ce pas drôle  ? N’est-ce pas drôle  ?

Hel atteint la place avant lui et se hisse sur le parapet du large puits. Méticuleusement, avec un sourire empli d’un sadisme incroyable, il sort de l’un de ses sacs un assortiment de viscères violacés qu’il enroule tout autour. Tan, qui déverse tout autour un mélange d’huile de lampe et de sang à demi coagulé, l’observe en riant follement. C’est vrai, après tout. C’est tellement drôle.

La centaine de cornichons, à présent terrés dans leurs foyers, qui voulait se protéger des dangers sournois de la région, en ne sortant jamais de leur sacro-sainte enceinte, cette assemblée de pleutres craignant jusqu’à la pluie, les voilà envahis de toutes sortes d’immondices. C’est à en hurler de rire.

Hel dispose avec soin des têtes coupées sur les pierres, y essuyant ses mains et laissant des gifles écarlates un peu partout, pataugeant avec son aîné dans le limon qui pour tout autre aurait été d’une pestilence insupportable. Ils dansent et chantent, vident les sacs dans des coins, pour ensuite traîner les carcasses dévorées par la nécrose, traçant des chemins horrifiants, de bouts d’intestins, de peaux arrachées et de sang quasiment noir.

Des cris s’élèvent un peu partout, le nombre de maisons est assez réduit, mais Tan verrait presque Am occupé à badigeonner les murs du même mélange que celui qu’il a déversé sur la place du village. Il l’imagine sourire aux visages apeurés ou furieux derrière le carreau, tandis que les humeurs carmines dégoulinent des murs dans un doux chuintement. Am se pencherait, langue pendante, les traits illuminés d’une jouissance infinie et écartèleraient sous leurs yeux de petits animaux déjà envahis par les vers, pour en laisser les reliquats sur le rebord de cette fenêtre. Il pendrait peut-être même des têtes juste au-dessus de la porte, envahi de plaisir à l’idée de la terreur qu’éprouveront les habitants en les voyant quand ils voudront sortir.

Sy apparaît au coin d’une ruelle et rejoint Tan, le visage souillé, mais rayonnant.

— Les entends-tu  ? ricane-t-il. Les entends-tu  ?

Tan ricane à son tour, et, par jeu, étale un peu d’huile sombre sur le visage de son petit frère. S’ensuit une joyeuse bagarre durant laquelle tous deux glissent et roulent dans la fange en se salissant l’un l’autre. Hel leur envoie un cerveau de mouton, qui se morcelle en dizaines de lambeaux jaune pâle sur leurs vêtements et ses deux aînés, en hurlant tels des possédés, se ruent sur lui et le plaquent à terre. Se vautrant dans l’huile et le sang comme des cochons dans leurs soues, ils grognent et griffent, pareils à des fauves psychédéliques.

— Vous vous amusez sans moi  ? s’étonne Am, qui les a rejoints, attiré par leurs cris.

— Mais non...

Hel le saisit alors par une cheville et le tire à eux. Am chute à son tour et ne tarde pas à être recouvert des mêmes ordures que ses aînés. Ils chahutent encore un moment, laissant libre cours à leur liesse, enivrés par l’odeur du sang, par les petits cadavres qu’ils écrasent en se roulant les uns sur les autres et par les prières des habitants qui ne comprennent plus rien.

Finalement, Tan rampe un peu à l’écart, s’ébrouant à la manière d’un chien pour se débarrasser des morceaux froids et spongieux, débris de cadavres si torturés qu’ils ne permettent aucune identification, il reprend son souffle. Il s’amuse bien, mais il leur reste un peu de travail. Il se lèche les doigts pensivement, contemplant ses trois cadets encore occupés à se frotter les uns contre les autres dans la boue visqueuse. Le goût du sang, de la chair pourrie, plus entêtant que le fumet des cadavres qu’il leur reste à disposer, s’attarde sur sa langue.

Il se relève et remarque un homme, derrière un carreau poussiéreux et ensanglanté, qui les observe sans comprendre. Il est bien trop stupide pour ça, de toute façon. Laissant libre cours à son humeur perverse, Tan donne un dernier coup de langue sur ses doigts et ramasse un rat mort, qu’il arrache à la boue soupirant après le corps brisé qui lui est arraché dans un vague bruit de ventouse. Son geste attire l’attention de ses trois cadets qui s’immobilisent, les yeux grands ouverts pour saisir le moindre détail de son geste. Des vagues de rire silencieux les agitent, tout particulièrement Hel qui découvre ses dents à l’image même d’un chien enragé.

Tan incline la tête de côté, les lèvres étirées dans un si grand sourire que l’on croirait que sa peau s’apprête à se déchirer sous la tension, et, presque sans bouger le bras, lance avec force le cadavre sur la vitre. Le verre explose en crissant, mais le cadre de bois résiste, brisant encore un peu plus le corps inerte dans un bruit mou. Le sang caillé éclabousse le reste de la fenêtre déjà rougie par le passage d’Am, mais le bruit de giclure gargouillant est couvert par les ricanements des quatre frères qui sortent de la gadoue, les cheveux raides, la peau crasseuse, les vêtements imbibés d’humeur vermeille et de jus de cadavre.

Tels des monstres aux visages d’hommes, les quatre fauteurs de troubles se tiennent épaule contre épaule, parmi les vers et les macchabées, ravis de leur forfait. Leurs quatre silhouettes, sur le ciel crépusculaire, se fondent en une seule créature sombre, dont les huit yeux gris étincellent de perversité. Il n’y a plus personne pour les voir, les volets ont été rabattus peu après que les scélérats ont institué leur déchaînement, alors «  le Désastre  » se calme peu à peu, comme rassasiés de leur repas gargantuesque, se contentant de profiter des restes avec gourmandise.

— Bien, commente seulement Tan en se pourléchant de nouveau les mains, sa langue épaisse ramassant des petits bouts de cervelle écrasée et des fragments de boyaux avec avidité.

— Il va bientôt faire nuit, constate Sy, occupé à retirer des éclats d’os de sa chevelure noire de sang et d’huile. Il va nous falloir partir.

Am fait la moue.

— Ces gens sont si bêtes, se plaint-il. Ne peut-on pas rester jusqu’à demain  ? Je meurs d’envie de voir leur tête.

— Ne commence pas, grogne Hel en lui assénant un coup de coude.

Cette fois, c’est Sy qui intervient, en les séparant fermement, agrippant les manteaux qui dégorgent leurs humeurs sombres pour les éloigner l’un de l’autre.

— Allons, il n’a pas tort. Contemplez, mes frères, ces rats tapis dans l’obscurité, ce ramassis d’êtres crédules qui se sont enfermés à l’annonce d’un hypothétique danger, ricasse Tan. Imaginez leur effroi, leur désarroi quand demain ils verront l’eau corrompue de leur ville et tous ses merveilleux cadeaux dont nous leur avons fait don.

Hel et Am gloussent, cependant que Sy se contente de sourire.

— Nous avons encore du travail, rappelle-t-il, avec un signe de connivence.

Dans un éclat de rire commun, qui s’apparente plus au croassement d’un corbeau, les quatre frères trottinent jusqu’à leurs sacs respectifs et vérifient qu’ils sont tous vides. Tan, tandis qu’il farfouille dans le sien, sent sous la pulpe de ses doigts quelque chose qui n’a ni la douceur ni la mollesse de la chair putréfiée, ni la dureté froide d’un os. Curieux, il sort l’élément déconcertant de son sac et découvre que ce n’est en fait qu’une main amputée, aux ongles longs et crasseux.

— Non, se dit-il avec douceur. Ce n’est pas pour eux.

Il sent, dans son ventre, que la bête s’est apaisée. Il s’en faut de peu pour qu’elle n’ait plus faim, mais il sait que ça ne durera pas longtemps. Une fois qu’il est certain de n’avoir plus rien à disposer, il va aider Sy qui arrange des peaux écorchées devant une porte, arrachant les poils rêches par jeu qu’il parsème ensuite un peu partout. L’air immobile empeste la mort, le ciel vire presque au noir sans que les étoiles brillent pour autant. Elles non plus ne veulent pas voir ça.

En voilà un comportement niais, songe l’aîné. Aussi sot que ces gens.

— C’était une bonne soirée.

— Excellente, convient Tan. J’ai hâte d’être à la prochaine.